Depuis la fin de semaine dernière, les journalistes politiques ne parlent plus que d'une chose : les fameuses propositions du rapport Attali. Première remarque : on ne peut que se satisfaire, et même se féliciter, de faire appel à des intellectuels, des experts, des universitaires, pour proposer des solutions aux différents problèmes économiques et sociaux que nous rencontrons. Très bien. surtout après la campagne présidentielle populiste que nous avons vécu, où la plupart des candidats (en tout cas les deux finalistes) préféraient écouter le citoyen lambda proposer des solutions que s'entourer d'une équipe qualifiée pour répondre aux problèmes soulevés par ceux-là. Donc si la commission Attali est synonyme du retour de l'intelligence et de la science comme conseillère de gouvernement, tant mieux.
- Premièrement, Attali lui même parle d'une commission et d'un rapport non partisan, voire apolitique. Comment ça? Plus de 300 propositions de réformes ce n'est pas politique? Le référentiel libéral présent à travers tout le rapport ce n'est pas politique? Tous les partis sont d'accord avec l'ensemble des propositions? Allons, arrêtons de nous resservir l'argument "ce n'est pas politique, c'est ce qu'il y a de mieux, on ne peut donc pas faire autrement". Non. Comme n'importe quelle mesure, cela entraîne des choix. Eliminer les départements c'est un choix. Faire passer le coût des cotisations sociales du travail vers la TVA c'est un choix. L'ensemble des mesures avancées constituent des choix politiques, qui nous conduisent vers tel ou tel projet de société. A chacun de voir si ce rapport va dans le sens du projet de société qu'il a en tête. Il y a certainement du bon et du moins bon dans ce rapport. Mais il faut justement en discuter, c'est ça la politique! Quoiqu'il en soit, ne faisons surtout pas comme si ces mesures allaient de soi et s'imposaient à tous. La politique c'est faire des choix entre différentes solutions pour aller vers un projet.
- Deuxièmement, le poids donné à cette commission. Sarkozy avait déclaré le 30 août : "Ce que vous proposerez, nous le ferons." Ah bon? Ce n'est donc plus un gouvernement ou un parlement qui décide, mais un groupe d'experts? Leur parole est donc au dessus de n'importe quelle considération. Dans ce cas là disons le clairement. Mais alors, changeons de régime. La légitimité du pouvoir n'est plus basée sur le pouvoir du peuple, mais sur la "connaissance" (ce qui implique évidemment qu'il n'y ait qu'une seule connaissance qui s'impose à tous). Si nous souhaitons rester en démocratie, les experts, intellectuels et autres sages, ne peuvent avoir qu'un rôle de conseil. On ne peut octroyer un rôle décisionnaire à leurs observations, sans passer par un contrôle démocratique. Il aurait plutôt fallut leur dire : "Ce que vous proposerez, nous l'étudierons sérieusement avec les représentants parlementaires dans notre volonté de réformer le pays".
4 commentaires:
Je suis assez d'accord avec toi dans l'ensemble.
Les missions de reflexion sont une valeur ajoutée sur la reflexion d'un problème politique et aussi d'éclairer les politiciens sur ce qui se produirait à l'avenir pour ces solutions.
Et, effectivement, les solutions sont choisies par les élus et elles doivent rester uniquement un conseil.
Normal quoi ! C'est la définition même d'une démocratie.
Concernant la phrase du 30 août, ce que je regrette (je me doute encore plus toi que moi) ce sont les mots utilisés par Sarkozy qui sont trop souvent mal employés car je pense que le gouvernement ne va pas faire une confiance aveugle aux propositions de la commission. Oui je sais, je suis peut-être trop naïf...
Le but de Sarkozy c'est : si les quelques propositions choisies par le gouvernement ne marcheront pas, il pourra avoir comme pretexte :
-que ce ne sera pas la faute du gouvernement
-et que même les spécialistes n'avaient pas prévus cet échec.
Pour moi, ce que NS veut c'est plus une protection pour lui et son gouvernement qu'une confiance aveugle à la commission pour faire de la démagogie...quoiqu'il en soit je suis d'accord avec toi qu'il n'aurait pas dû utilser ces termes.
bn comme j'ai été rapide, j'ai écrit comme une merde...
100% d’accord.
Mais il y a un troisième point important : Attali a déclaré sur France Culture (peut être ailleurs aussi, je ne sais pas) que les recommandations de la commission sont à prendre en entier ou pas du tout. Il a même signalé qu’il ne s’agit pas d’une série de recettes qu’on peut appliquer de manière isolée. Cela montre qu’il s’agit bien d’un choix politique cohérent. D’autre part cela renvoie au gouvernement la responsabilité sur les conséquences négatives des choix de la commission car il sait que le gouvernement ne peut pas tout appliquer. Super alibi !
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